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Crise en centrafrique :Joseph Zoundeko Chet d'Etat Major des Ex-Séléka « Ils ne veulent plus entendre Allaho Akbar à Bangui »

ZOUNDEKO.pngInterview de Joseph Zoundeko, est la première du genre donnée à une agence de presse Internationale: Réalisée par Thierry Brésillon  

 

« Ils ne veulent plus entendre Allaho Akbar à Bangui, ce sont les autres qui ne veulent plus vivre avec les musulmans», a déclaré à Anadolu le nouveau chef d’état-major de l’ex-coalition Seleka Joseph Zoundeko, dans une interview réalisée à Bambari, dans le nord centrafricain. Il a par la même occasion affirmé que les signes d’un retour proche à une coexistence pacifique en RCA ne sont toujours pas perceptibles, soulignant que l’aile politique de Seleka, récemment désigné, aura constamment des comptes à rendre à l’aile militaire qu’il gère. Tout autant qu’il a exigé du gouvernement de faire sortir les éléments Seleka cantonnés dans l’ouest du pays pour les ramener dans le nord. 

AA- Voulez-vous vous présenter rapidement ?

JZ- Je suis né en 1974, dans la région de Birao (Nord-est centrafricain). J’ai suivi une formation dans le cadre de l’administration des eaux et forêts entre 1995 et 1997, pour un projet anti-braconnage. J’ai été affecté dans la région de N’délé. On nous taxait de musulmans, les fonctionnaires, les militaires refusaient les nordistes. C’est pour cette raison que j’ai rejoint la rébellion de l’UFDR en 2006. En 2007, je suis devenu le chef d’état-major de l’ l’Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR). Pendant la période où la Seleka était au pouvoir, j’étais chef de région militaire.

AA- Quelle est la nature de la force militaire que vous commandez aujourd’hui ?

JZ- Nous ne sommes plus des rebelles. Désormais, nous nous désignons comme la Force républicaine. Nous exerçons notre autorité sur cette zone au nom de la République. Nous n’avons pas de rapport avec la présidence, mais elle peut nous appeler. Nous n’avons également aucune relation avec les FACA (Forces armées centrafricaines, ndlr). Elles n’existent pas en réalité. D’ailleurs, toutes les FACA et tous les gendarmes sont actuellement des anti-balaka. Il faudra passer par le dialogue, la réconciliation et la négociation avant de réintégrer les ex-FACA qui sont dans nos rangs dans ceux des FACA actuelles. En attendant, leur vie serait en danger.

AA- Pour quelle raison la Seleka s’est-elle dotée d’un état-major ?

JZ- Nous sommes partis en débandade (après la démission du président Michel Djotodia en janvier 2014, ndlr). Trop d’éléments sont incontrôlés, trop de gens usurpent l’identité de la Séléka. Nous voulons en finir avec cette situation pour y mettre de l’ordre. Nous avons un état- major unique pour tous les mouvements. Nous sommes en train de créer une chaine de commandement qui couvre huit préfectures. Notre priorité est de connaître notre effectif et d’identifier les éléments authentiques de la Seleka. Nous allons également vérifier la nationalité de ces combattants pour ne pas être accusés d’introduire des étrangers dans le pays. Nous allons ensuite regrouper tous nos éléments et mettre fin aux dérapages. Nous allons mettre en place une police et une justice militaires qui appliqueront les règlements militaires centrafricains.

AA- Votre commandement militaire peut-il avoir une vocation offensive ?

JZ- Notre vocation est uniquement défensive. En aucun cas nous n’aurons d’option offensive pour progresser vers l’ouest.

AA- Connaissez-vous exactement jusqu’où s’étend la zone que vous contrôlez ? A Grimari notamment, des anti-balakas sont encore présents…

JZ- Cette ligne passe par Kaga-Bandoro et Dekoa (nord-est de la RCA). Le statut de Grimari (nord-est) est encore incertain. Nous n’avons pas encore décidé où nous allons planter les piquets. Mais, la tension sur la zone provient de l’arrivée d’anti-balaka en provenance de Bangui. La région nord-ouest, à la frontière du Tchad n’est pas sous notre contrôle.

AA- Comment allez-vous pourvoir l’administration dans les préfectures que vous contrôlez ? Accepterez les fonctionnaires nommés par Bangui ?

JZ- Si nous acceptons les fonctionnaires nommés pas Bangui, où iront les nôtres, les fonctionnaires musulmans qui ont fui l’ouest du pays ? Cela dit, si on affecte des enseignants, des infirmiers, nous n’allons pas les refuser. Mais, à Bangui tous les fonctionnaires sont devenus anti-balaka.

AA- Quel rapport entretenez- vous avec l’aile politique de votre mouvement ?

JZ- Ce sont les militaires qui ont donné mandat à la coordination politique. C’est l’aile militaire qui prime et la coordination politique lui rend compte.

AA- Quels objectifs avez-vous assigné à la coordination politique ?

JZ- D’abord, l’exfiltration de tous les musulmans de Bangui et de l’Ouest du pays qui vivent sous la menace des anti-balaka. Ensuite, la contribution à l’application de l’accord de Ndjamena, stipulant l’attribution à l’ex-Seleka le poste de Premier ministre, et les ministères de la Défense, de l’Intérieur et de l’administration territoriale. Tout est prévu, tout est négocié, nous n’allons pas renégocier. Par ailleurs, nous avons posé un ultimatum d’une semaine au gouvernement pour que toutes les exactions contre les musulmans cessent. Nous exigeons des réparations pour les biens des musulmans perdus ou détruits et l’investissement dans les infrastructures dans les régions du Nord.

AA- Quelle est l’alternative si vous ne trouvez pas d’accord politique ? Ne craignez-vous pas une partition de fait ?

JZ- Nous ne souhaitons pas la partition du pays. Mais, il faut reconnaître que pour l’instant nous ne voyons pas de perspective proche de retour à une coexistence pacifique. Ce sont les autres qui ne veulent plus vivre avec les musulmans, déclarant qu’ils ne veulent plus entendre « Allaho Akbar ». A Bangui, on nous dit : « rentrez chez vous ! », mais alors pour qui est Bangui ? Ici, nous n’avons pas détruit les églises, les chrétiens continuent à vivre ici. Nous ne menons pas une guerre de religions.

AA- Vous avez décidé de tenir votre congrès dans un mois à Bangui pour désigner votre dirigeant et vos instances. Est-ce réalisable ?

JZ- D’abord, ce congrès a besoin de moyens, il faudra probablement le retarder. Ensuite, c’est impossible que nous puissions le tenir à Bangui. Qui va assurer notre sécurité ? Nous verrons plus tard où il sera possible de le tenir.

AA- Quel avenir envisagez-vous pour vos éléments toujours cantonnés dans l’ouest du pays (au camp RDOT, au camp Béal, à Berero) ?

JZ- Nous demandons au gouvernement de les faire sortir et de les ramener ici.

 

 

 

©Anadolu Agency



26/05/2014

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