Centrafrique : les chemins de la haine
[ La Centrafrique est un pays pauvre d’Afrique centrale, mal connu, sauf à évoquer le nom de Bokassa qui a laissé une trace caricaturale dans l’histoire. Pays connu pour une certaine douceur de vivre des européens, pays attractif pour le tourisme et pour la chasse, rien ne laissait prévoir la violence des évènements qui se déroulèrent en République centrafricaine depuis le début de l’année 2013. Dans une contribution passionnante, l'historien Bruno Martinelli, professeur d’anthropologie à Aix-Marseille Université, revient sur les racines du mal
La séquence dramatique en Centrafrique (1) commença au cours du mois de décembre 2012 avec l’entrée en scène d’une rébellion nordiste que nul ne connaissait sous le nom de Seleka (2). La Seleka est une coalition de rébellions armées qui se constitua très rapidement à la fin de l’année 2012 dans le Nord-Est du pays. Les régions où se sont formées ces rébellions, le Bamingui Bangoran (Ndele) et la Vakaga (Birao), sont excessivement pauvres, peu peuplées (3) et abandonnées des services de l’État (Lombard-Nicolaysen, 2012). La sécurité des biens et des personnes est laissée à des groupes d’auto-défense depuis plus d’une vingtaine d’années ou, de facto, à des groupes de rebelles dans les territoires qu’ils contrôlent et qu’ils administrent sur le plan de la sécurité ou de la santé par l’intermédiaire d’ONG. En moins de trois mois (4), cette rébellion nordiste prit le contrôle de l’ensemble du territoire national. Le 24 mars 2013, elle entra dans Bangui. Le président François Bozizé (5) avait fui à bord d’un hélicoptère vers le Cameroun quelques heures avant l’entrée des rebelles dans le palais présidentiel. La rébellion proclama Michel Djotodia, l’un de ses leaders, président de la République. Cette présidence rebelle fut reconnue par la Communauté Économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) (6) en charge d’une « transition » devant s’achever par des élections démocratiques.
2013, année de toutes les violences
Parvenue au pouvoir, la Seleka instaura un régime de répression qui légitimait les exactions et les pillages des rebelles sur l’ensemble de la population. Leur répondant par une violence terroriste antimusulmane, des groupes armés anti-balaka (7), opérant dans la capitale comme dans les villages, commirent des massacres qui entrainèrent la fuite de plus de 100 000 musulmans vers les pays voisins et le déplacement de plus de la moitié de la population de Bangui vers des camps, sous la protection des églises et des militaires étrangers (8).
Contrairement à ce que déclarent la plupart des acteurs et des commentateurs de la situation centrafricaine actuelle, je ne pense pas que les violences des milices anti-balaka s’expliquent seulement comme une réponse aux violences commises par les seleka durant l’année 2013. L’omniprésence du langage de la haine associé à des actes collectifs exige de remonter plus loin dans le passé vers les traces de faits antérieurs en sachant qu’en l’état actuel des connaissances, il est improbable d’en découvrir les origines. Il faut se contenter d’en saisir les séquences les plus récentes. Depuis le début des années 1990, les évènements de violence armée se sont succédés avec leur cortège de pillages et de massacres : mutineries de 1996 et1997, tentative de coup d’Etat de Kolingba en 2001, pillages des mercenaires congolais banyamulenge venus défendre le régime de A.F. Patassé en 2002. En mars 2003, les mercenaires « libérateurs » tchadiens zaghawa qui portèrent F. Bozizé au pouvoir se livrèrent à leur tour à un pillage intensif de Bangui, durant plusieurs mois. Un ressentiment antimusulman se développa car les musulmans centrafricains semblèrent épargnés par ces pillages et certains furent accusés de collaborer avec les tchadiens.
Les racines de la haine
D’un point de vue objectif d’anthropologue, la thèse d’une coexistence pacifique« traditionnelle » entre chrétiens et musulmans en Centrafrique (Filacota, 2012) répétée de manière dogmatique par les déclarations officielles relève d’un vécu social de quartiers et de familles mixtes mais ne permet pas d’aborder les causes sociologiques de la violence. Les pacificateurs infatigables de la situation actuelle que sont l’archevêque catholique Dieudonné Nzapalainga, l’imam Omar Kobine Layama, président de la conférence islamique de Centrafrique et le révérent Nicolas Guerekoyame-Gbangou, pasteur de l’église évangélique Elim utilisent légitimement cet argument moral et politique de médiation et de réconciliation au cours d’interventions quasi héroïques sur tous les fronts de la violence à Bangui et à l’intérieur du pays. Ce discours a une réelle efficacité sur les observateurs étrangers et les institutions internationales mais il fait écran à la réalité des conflits avec un effet d’amnésie sur la succession des évènements de violence. Au cours de la dernière décennie 2003-2013 (correspondant à celle du pouvoir Bozizé), des incidents débouchèrent sur des affrontements sanglants d’intensité croissante au cours desquels la centrafricanité des musulmans a été de plus en plus systématiquement mise en cause. Les expressions de haine qui sous-tendent les actes de violence actuels se fondent sur une conscience victimaire de la majorité non musulmane centrafricaine qui s’est construite au cours d’évènements de violence réitérés qui ont laissé des traces profondes dans la mémoire.
L’un des derniers évènements eut lieu le 29 mai 2011 à la suite de la découverte des corps de deux enfants dans le coffre de la voiture d’un commerçant tchadien. Après avoir visé la famille du présumé coupable accusé de magie et de sorcellerie, la violence meurtrière s’étendit très rapidement à l’ensemble du quartier du Km5, une mosquée fut attaquée. Ce jour là (comme le 5 décembre 2013) de nombreux cadavres de musulmans martyrisés furent alignés dans la mosquée Ali Baboro du Km5 (9). Les jours suivants, les violences et les destructions s’étendirent à l’ensemble des quartiers musulmans de Bangui. D‘autres mosquées furent attaquées. Le couvre-feu fut décrété pour une durée indéterminée. En représailles, le lendemain matin, une église catholique du quartier Yapele fut incendiée et saccagée. Ces évènements (10) suivirent un scénario identique à ceux de 2013-14 à la différence qu’ils furent contrôlés au bout d’une semaine par la force publique. Une délégation gouvernementale tchadienne (11) vint à Bangui pour examiner la situation et mettre un terme aux violences.
« Centrafricanité » face aux influences du Tchad
Les violences populaires furent alimentées par les rumeurs les plus diverses contre les commerçants musulmans, les assimilant collectivement à des trafiquants d’organes humains pour la sorcellerie et exigeant, à ce titre, leur exécution ou leur expulsion du territoire centrafricain. Plusieurs pays africains (Afrique du Sud, Nigeria) ont récemment connu des campagnes d'expulsion de masse d’« étrangers » menées par des foules en colère qui les accusaient de sorcellerie (Hickel, 2014 :103). Cet argument est l’instrument d’une stigmatisation radicale de leur identité et de leur nationalité. A Bangui, à partir des évènements de 2011, un thème jusque là sous-jacent émergea au premier plan des affrontements, celui de la centrafricanité douteuse des musulmans et de leur origine étrangère, essentiellement tchadienne.
La venue de la délégation tchadienne pour négocier la paix renforça cette conviction. La vieille thèse d’un programme de persécution des centrafricains par les tchadiens avec la complicité d’une sorte de franc maçonnerie musulmane se trouva renforcée. Les explications recueillies auprès des acteurs de 2011 montraient qu’ils faisaient référence à une mémoire longue des violences remontant aux événements de 2003. Rétrospectivement, tout se passa donc comme si les évènements de juin 2011 étaient une répétition à petite échelle de ceux qui allaient se produire en décembre 2013, franchissant un point de non retour dans l’engrenage de l’horreur. A la différence des conflits antérieurs résolus par la médiation et des négociations, les violences des anti-balaka ont pour objectif irréductible de mettre en cause la nationalité centrafricaine des musulmans et leur présence sur le territoire. Bien que la majorité des centrafricains ne partage pas les idées des anti- balaka, à travers l’exode massif des musulmans, leurs objectifs terroristes ont été atteints.
Djotodia au pouvoir, la Seleka éclate
Du 24 mars 2013 au 10 janvier 2014 (12), la République centrafricaine a vécu sous la loi de la Seleka, bien que le terme de Seleka devienne de plus en plus confus et ambigu. Derrière la légitimité d’une insurrection qui, initialement, exprimait les revendications de régions déshéritées du Nord du pays, soutenue aussi bien par les États que par les rébellions des pays voisins (Tchad, Soudan), en s’installant au pouvoir la Seleka a perdu toute identité culturelle (runga, gula) et politique. Pour le citoyen centrafricain, elle est devenue progressivement un ensemble hétérogène de groupes armés coupables d’exactions. Pour avoir une efficacité décisive face à l’armée centrafricaine FACA, la Seleka avait bénéficié d’appuis financiers et logistiques du Tchad et du Soudan qui lui permirent d’enrôler de nombreux combattants étrangers, des mercenaires expérimentés des guerres du Tchad et du Darfour mais aussi des bandits coupeurs de routes et des trafiquants. Après la victoire, chacun de ces groupes retourna à ses activités « professionnelles » habituelles sous l’autorité de ses chefs. Certains groupes ne reconnaissaient aucune hiérarchie militaire externe, aucune autre autorité que celle du chef qui les avait recrutés et continuait à assumer sans partage leur commandement.
Les partis centrafricains qui avaient créé la Seleka en 2012 (UFDR, CPJP etc.) ne parvinrent pas à la transformer en un mouvement politique unifié jusqu’à sa dissolution le 13 septembre 2013. La division était telle au sein du mouvement que le président Djotodia ajouta dans son discours de dissolution depuis le palais présidentiel que tous ceux qui se déclareraient encore membre de la Seleka « seraient considérés comme des bandits » ! Les violences et exactions ininterrompues des groupes rassemblés sous le nom de Seleka avaient ruiné les projets du gouvernement et démontré son incapacité à protéger les citoyens et établir un ordre public. Si certains de ces groupes étaient incontrôlables, d’autres étaient proches des ministres du gouvernement qui avaient conservé des fonctions militaires. Les doubles statuts et appartenances, les proximités, échanges et passages entre politiques, militaires, rebelles, mercenaires, entrepreneurs ont généré de multiples formes de collusion entre banditisme et pouvoir politique. Malgré la précision des preuves établies sur les responsabilités de certains officiers ou chefs de groupe au cours d’opérations de désarmement dites de « porte à porte », qui étaient en fait des opérations de pillage systématique, la justice enregistrait les plaintes mais n’engageait aucune poursuite contre ces officiers. L’assassinat du juge modeste Bria Directeur général des services judiciaires au Ministère de la Justice renforça la prudence des magistrats dans le traitement des affaires mettant en cause des personnalités de la Seleka. Les dossiers restèrent plus longtemps, voire indéfiniment à l’instruction. Lorsque des soldats de la Seleka étaient jugés et condamnés pour l’exemple, leurs peines n’étaient pas exécutées. Pour la démonstration, je retiendrai le cas le plus significatif, celui du général Moussa Assimeh Moussah Assimeh (13). Soudanais de la tribu nomade arabe des Rezeigat, il se prétendait natif de la Vakaga et donc de nationalité centrafricaine. Ce colonel janjawid avait dirigé des opérations sanglantes au Darfour, crimes contre l’humanité, pour lesquelles il était poursuivi par la Cour Pénale Internationale. Cet officier entra dans la Seleka à la tête de 700 combattants soudanais. Il est responsable de nombreuses violences commises sous son commandement lors des attaques du quartier Boy Rabe, les 13-14 avril et le 20 août 2013 puis, par la suite, du quartier Boeing près de l’aéroport. Sous prétexte de procéder à des désarmements, les janjawid se livraient à toutes sortes d’exactions : pillages, viols, tortures et assassinats. La collusion entre l’entrepreneur de pillages Assimeh et l’homme politique Djotodia a été initiée dès 2012, au Soudan, au moment de l’adhésion du général à la Seleka. Une étroite collaboration assura la protection rapprochée du président et une protection quasiment sans défaut de toutes les opérations menées par Assimeh à Bangui. Rattrapé par les poursuites judiciaires de son lourd passé soudanais et l’imminence d’une arrestation par les forces internationales de la MISCA, Moussa Assimeh dû fuir précipitamment de Bangui le 20 octobre 2013 avec hommes, armes, bagages et butins vers la Vakaga puis Khartoum.
Réaction génocidaire des anti-balaka
Les milices d'autodéfense se sont constituées dans l’ensemble du pays en réaction à ces violences. Le mouvement anti-balaka est constitué d’entités hétérogènes. On y trouve des combattants issus des groupes d’auto-défense créés dès les années 1990, qui faisaient, en ce temps là, office de polices rurales pour assurer la répression contre des bandits, des nomades auteurs de razzias et des « coupeurs de routes » zarguinas dans les régions rurales de l’Ouest et du Nord de la République centrafricaine. En 2013, dans le nouveau contexte de violence généralisée, à ces éléments d’origine rurale, se sont ajoutés des militaires de l’ex-armée centrafricaine (FACA) qui luttent pour la reconquête du pouvoir par la force et le retour du président Bozizé. Ces milices ne sauraient être désignées comme « chrétiennes » ainsi que le fait habituellement la presse internationale. Leurs actions ne se réfèrent pas à la religion chrétienne et ils ne bénéficient de l’appui d’aucune église. Ils font au contraire beaucoup de références aux croyances magiques animistes et grand usage de talismans. Le plus grand nombre d’anti-balaka est constitué de petites bandes armées exclusivement motivées par le pillage et, pour la plupart, incontrôlables. Ces bandes trouvent dans les arguments génocidaires les plus élémentaires (14) le motif idéal d’exécuter sauvagement des musulmans pour s’approprier ou détruire leurs biens. Ces meurtres sont commis le plus souvent à la machette. L’horreur des actes et leur caractère spectaculaire ne sauraient être imputés seulement à la folie et à la haine. Par le truchement du symbolique, des actes comme l’émasculation, la mutilation, l’éviscération, les violences infligées aux cadavres visent à déshumaniser les victimes et ainsi ancrer l’horreur dans la mémoire. Les gestes et les paroles accusatoires et vindicatoires de cette haine projetée sur la victime émissaire sont d’ordre sacrificiel (15).
La logique masquée de cette violence est d’instaurer une nouvelle mémoire, autoritaire et irréversible, effaçant les traces de mémoires antérieures : celle des premiers pactes et rituels de coexistence pacifique, des échanges matrimoniaux, du petit commerce, de la reconnaissance des associations musulmanes dans le débat public centrafricain (Filacota,2012). C’est de l’ensemble de cette expérience que les plus extrémistes parmi les anti‐balaka ont voulu faire « table rase » et cela s’entendait dans la terrible redondance des expressions verbales qui accompagnaient les gestes meurtriers.
« Système régional de conflits »
L’histoire de l’année 2013 aura été marquée par des engrenages inédits de violences, la plupart peu prévisible (16) pour ce pays. Comment tant de personnes ont-elles pu se laisser entrainer dans ce tourbillon de violence meurtrière ? Les seleka et les anti-balaka n’étaient pas tous des délinquants analphabètes. L’épreuve la plus pénible fut, pour moi, de retrouver quelques-uns des étudiants d’anthropologie de l’université de Bangui, armés, participant à des actions violentes, tenant les discours les plus extrémistes.
Les événements de 2013 ne sont pas les fruits du hasard. Ils font partie d’un « système régional de conflits » selon l’expression que Roland Marchal (2006) a employé pour caractériser les conflits des principaux pays de la région autour du Darfour dans les années 2000 : Tchad, Soudan et Centrafrique. Cette hypothèse mérite d’être examinée. Après les accords de 2009 entre le Tchad et le Soudan, la guerre a cessé au Darfour et cette région est devenue selon la formule de Marielle Debos « un vaste marché d’entrepreneurs de guerre » (2012 : 126). De nombreux combattants se sont trouvés disponibles pour de nouveaux engagements alors que plusieurs nouveaux épicentres de conflits se constituaient : le Nord du Nigéria et la zone sanctuaire de Boko haram, l’État du Soudan du Sud, devenu indépendant en 2011 et en 2013, la République centrafricaine. Alors que les rébellions à majorité de combattants musulmans étaient intervenues jusque là dans des régions et des pays à majorité musulmane contribuant à des changements ou des renouvellements de forces sociales, la République centrafricaine est un pays peuplé de 85 % de chrétiens (17). C’est une donnée politique radicalement différente et nouvelle. A la faveur de la marche conquérante de la Seleka, ces combattants majoritairement musulmans qui n’avaient plus leur place au Tchad et au Soudan sont entrés en masse en République centrafricaine avec le projet de s’en approprier les ressources mais aussi de s’installer dans les régions musulmanes du Nord et de l’Est. C’est l’une des clés du débat sur la partition.
Etat inexistant et tensions identitaires
Régulièrement, la presse internationale qualifie la crise centrafricaine de « guerre interconfessionnelle ». Les adjectifs « religieux » ou « confessionnel » sont des choix de vocabulaire inducteur de sens pour qualifier des tensions qui, comme nous l’avons vu, travaillent la société centrafricaine depuis des décennies. Être chrétien ou musulman ne fait pas ici référence aux pratiques religieuses mais à l’identité collective, voire la nationalité. Les tensions religieuses sont, le plus souvent, de tensions identitaires, sociales, historiques, territoriales, juridiques etc. En ce qui concerne les musulmans centrafricains, elles relèvent d’ostracismes ordinaires qui ont des racines lointaines dans le passé, se revivifient et se radicalisent dans des situations de crise de plus en plus aigues. Si l’on examine attentivement les paroles et les textes émis, aujourd’hui comme il y a 10 ans, qu’entend-on de manière récurrente ? D’un coté : « nous musulmans, nous sommes des centrafricains », « nous possédons la Centrafrique autant que vous » et de l’autre « vous, musulmans, on ne veut plus de vous dans ce pays, vous êtes des étrangers, vous êtes des tchadiens ». Sur cette base d’assertions opposées se déclenchent des actes de violence d’une amplitude variable : insultes et provocations verbales, destruction de Bibles et de Coran, démolitions de mosquées et d’églises, lynchages et meurtres. Les causes du drame centrafricain sont enchevêtrées mais la cause première en a été l’effondrement de l’État. Ce processus s’est déroulé sur plusieurs décennies, les gouvernants successifs, de Bokassa à Bozizé, ayant tous leurs parts de responsabilité. L’environnement international (Tchad et Soudan) a contribué à cet affaiblissement de l’État centrafricain.
Cet article a contribué à expliquer pourquoi la rébellion Seleka ne pouvait constituer une alternative de gouvernement et, au contraire, a cédé à l’emprise d’entreprises prédatrices sans précédent visant la société, l’économie et les ressources centrafricaines. Au terme de cette analyse, il reste la causalité la plus complexe que nous avons découverte au fur et à mesure des évènements, celle des mécanismes de la haine. C’est une interrogation à laquelle nous n’avons que partiellement répondu. L’examen des données empiriques nous a permis de saisir l’existence d’une mémoire de violences enfouies et stratifiées, d’un substrat d’animosité visant les musulmans au point de mettre en cause leur identité centrafricaine. La reconstruction de l’État centrafricain passera nécessairement par un travail de thérapie sociale, morale et politique à l’instar de ce qui a été entrepris en Afrique du Sud ou au Rwanda et par une réflexion sur les traces que ces vagues de violence seleka puis anti-balaka auront laissées dans les mémoires des différentes communautés, au risque de voir ces évènements se reproduire.
Analyse : Bruno Martinelli
©mondafrique
NOTES :
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