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Centrafrique : Chroniques douces-amères – 18

[ Par  Prosper INDO|Mis à jour|jeudi 23 octobre 2014 ]

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« Sans la liberté de blâmer, il n’y a point d’éloges flatteurs »(Beaumarchais)

Transition : Clap de fin le 15 février 2015 ?

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A vouloir ne pas respecter la lettre et l’esprit des textes, on condamne la RCA aux tâtonnements inutiles et à la prolongation de la crise.

Au sortir d’une consultations avec les différents acteurs politiques centrafricains, le chef de l’Etat de la transition a fixé la fin de la transition en cours au 15 février 2015. Il y a quelques jours, elle était persuadée du contraire et tentait de nous en convaincre.

Au lieu de lancer un appel salutaire au sursaut national en appelant tous les postulants à la candidature présidentielle à l’aider à pacifier le pays, elle choisit un acte d’autorité puérile et expose notre pays au suicide collectif ; après moi le déluge… C’est ingrat !

 

Le proverbe dit : « Tout a une fin, sauf la banane qui en a deux ».

 

Le milliard évaporé déclenche une enquête parlementaire.

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Jeudi 16 octobre 2014, le président du Conseil national de la transition a annoncé la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire charger de faire la lumière sur la destination donnée à la somme d’un milliard de francs CFA distraite d’un don angolais d’un montant global de 10 millions de dollars américains, conformément à l’article 23 du règlement intérieur de l’institution parlementaire.

Le plaidoyer du premier-ministre ne semble pas avoir convaincu son auditoire, et sa suggestion de recourir à la saisine de la Cour des comptes – disposition inscrite dans la Charte constitutionnelle de la transition - a fait long feu.

 

Le proverbe dit : « Celui qui vit près de l’eau sait nager ».

 

Milliard évaporé : le conte de Bouki va à la mer.

 

Trop d’explications tuent l’explication ! Dans un plaidoyer long et touffu, le premier-ministre du gouvernement de transition a tenté de justifier la destination du milliard de francs CFA . Il aura commis une erreur d’appréciation et de jugement.

Dans son propos liminaire, il a inutilement braqué son auditoire en laissant à penser que l’interpellation des conseillers était une « polémique inutile », un contre-feu allumé par les ennemis de la transition pour torpiller sa « Déclaration de Réengagement en vue de la mise en œuvre de la feuille de route » adoptée par la communauté internationale et le CNT ! Ce serait donc un complot, un de plus !

L’erreur de jugement a consisté à détailler la destination supposée de ces « fonds spéciaux », au mois le mois, en arguant d’appellations trop générales ou trop vagues pour convaincre, ou en tentant d’éclabousser tout le monde. Le premier-ministre a tort de persévérer dans la suffisance : dans les grandes démocraties, les fonds spéciaux, qui étaient utilisés à des fins privées ( compléments de rémunération des ministres et de leurs collaborateurs) et pour le financement illégal des partis politiques, ont été supprimés (France : 2001). Ils ne servent plus que pour couvrir les opérations des services de renseignements, sous le contrôle, sur pièces justificatives, d’une Commission parlementaire.

En faisant appel aux exemples étrangers, Mahamat Kamoun a tout faux ; ce n’est pas parce que ton voisin bat sa femme que tu dois en faire autant.

Comme dirait le livre de Leuk-le-lièvre : «  le conte de l’oncle Bouki - l’hyène va à la mer »!

 

Le proverbe dit : « Quand on enterre un cadavre, on ne laisse pas ses pieds dehors ».

 

Le voyage macabre des ex-Séléka et anti-Balaka à Kouango.

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Des informations de bonne source en provenance de Bambari, « des individus armés se réclamant des anti-Balaka, partis de Bambari en direction de Kouango, ont froidement assassiné cinq personnes à Bangao et Bombella, les accusant de collaborer avec les ex-Séléka et d’avoir divulguer la position de leurs troupes ». A l’inverse, dans un autre village situé sur la route menant à Kouango, les éléments des ex-Séléka basés dans cette ville, et supposés appartenir au clan du « général Ali Darrass, auraient exécuté en public deux jeunes hommes sous l’accusation de trahison et d’appartenance supposée à la milice anti-Balaka ».

Kouango étant une sous-préfecture de la Ouaka dont Bambari, le chef-lieu, est le siège de l’état-major des ex-Séléka, le « général » Joseph Zoundeko, ancien bourreau de la région de l’Ouham-Pendé sous le régime de Michel Djotodia, doit assumer la responsabilité de ces forfaits devant le tribunal spécial ou la CPI.

Déjà en mars 2013, au plus fort de l’expédition des troupes de l’alliance Séléka, Kouango avait souffert le martyr. En mai 2014, un collectif villageois avait lancé un pathétique SOS resté lettre morte.

Le chef de l’Etat de la transition devrait se montrer plus attentive au triste sort de Kouango.

 

Le proverbe dit : « La poule n’a jamais honte de son poulailler ».

 

Quand la Médiation internationale de la crise centrafricaine se trompe d’interlocuteurs.

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Une délégation de la médiation internationale dépêchée par le président congolais Denis Sassou Nguesso a séjourné à Bangui ce samedi 18 octobre 2014 pour rencontrer les signataires de l’accord de cessation des hostilités issu, du Forum de Brazzaville, et ramener le calme après la flambée de violences des quinze derniers jours ayant entraîné une vingtaine de morts, des centaines de blessés et des milliers de déplacés.

« Nous condamnons ces évènements. Nous voulons que les Centrafricains se remettent ensemble, se parlent, dialoguent. C’est par le dialogue, le débat d’idées qu’on sortira de cette crise de manière durable » a indiqué le ministre congolais des Affaires étrangères.

L’erreur consiste à penser qu’en face, il y a des oreilles qui écoutent et des responsables politiques qui ont une vision précise de l’avenir de la RCA. La réalité est moins reluisante : des voyous, des truands, des bandits et des mafieux ont pris possession du territoire et n’entendent que le langage de la force et de la répression. Il faudra s’y résoudre.

 

Le proverbe dit : « Quand on coupe les oreilles, le cou s’inquiète » !

 

Les menaces aux sanctions de l’Onu sont inaudibles.

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L’émissaire du Médiateur de la crise centrafricaine, le ci-devant ministre congolais des Affaires étrangères, Basile Ikouébé est formel : « il n’y aura pas de troisième transition. Il faut se dire que nous allons aux urnes ». Autrement dit, il enjoint au gouvernement de la transition d’élaborer le chronogramme des activités qui doivent conduire les différentes étapes du processus électoral d’ici au 15 février 2015.

A l’adresse des fauteurs de troubles, le ministre est moins explicite : « il y a des résolutions de l’Onu, il y a des personnes ciblées et ces mesures n’ont pas été activées parce que nous privilégions le dialogue politique ». Après neuf mois et demi de dialogue, la communauté internationale devrait bien se rendre à l’évidence, non ?

 

Le proverbe dit : « Celui qui demande qu’on lui répète, n’est pas forcément sourd ».

 

La ville de Kaga-Bandoro ne voit venir aucun miracle.

 

Aux dernières nouvelles, les éléments de l’ex-rébellion Séléka, qui s’étaient mis en mouvement il y a quinze jours en direction de Bambari, certainement pour assister à l’assemblée générale du parti populaire pour la renaissance du Centrafrique (PPRC), convoquée par le premier vice-président dudit mouvement, le « général » Nourredine Adam, ont choisi de regagner leur base d’attache. Plusieurs convois de véhicules armés sont rentrés dans la ville de Kaga-Bandoro, suscitant l’inquiétude de la population qui commence à fuir en brousse.

Une autorité locale a qualifié cette entrée de calvaire : « nous les autorités, nous ne pouvons pour le moment rien faire. L’autorité de l’Etat n’existe pas dans la ville depuis que les groupes armés se sont installés ici. Nous écoutons les pleurs et les doléances de la population mais nous ne pouvons pas apporter des réponses comme au beau vieux temps. Ce que nous faisons, c’est de rendre compte à Bangui et attendre les miracles ».

Pour les ex-Séléka, placés ici sous la responsabilité d’un certain « général » Alkhatime, il s’agit de cinq véhicules seulement, pas plus, venus pour une réunion : « nous voulons donner des consignes » !

 

Le proverbe dit : « Là où la hache va, c’est pour couper du bois ».

 

La réponse de la bergère aux bergers.

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Le 7 octobre 2014 dernier, s’invitant devant le Conseil national de la transition (CNT) pour restituer les conclusions du Forum de Brazzaville tenu 3 mois plus tôt, le chef de l’Etat de la transition avait laissé planer une menace voilée : rendre publique la liste des bénéficiaires du 1,3 milliard distrait du don angolais. Le journal « Le Citoyen » de Bangui a livré hier, mardi 21 octobre 2014, la liste des premiers récipiendaires. Elle est renversante et comprend des noms qui devraient être au dessus de tout soupçon. Hélas ! Parmi ces personnalités, la figure la plus emblématique est celle de Joseph Bindoumi : ancien procureur de la République près le TGI de Bangui, ancien ministre de la Justice et de la Moralisation de la vie publique (cela ne s’invente pas) sous François Bozizé, et aujourd’hui président en exercice de la Ligue centrafricaine des doits de l’homme. Autre ripou, l’inévitable Cyriaque Gonda, président du minuscule parti national pour un Centrafrique nouveau (PNCN), ancien ministre d’Etat à la communication de François Bozizé, revenu en grâce sous Michel Djotodia en qualité de directeur du Forum de Réconciliation nationale, un bidule censé vanter les mérites du mahométan, qui se liera d’intérêts plus tard pour les anti-Balaka de Patrice Ngaïssona, le genre…

Après « Les 7 mercenaires » et « Les 12 salopards », voici « Les 14 ripoux ».

 

Le proverbe dit : « C’est pas parce que le chacal a mauvaise haleine qu’il faut l’empêcher de bailler ».

 

L’ambassadeur de France au Congo-Brazzaville préoccupé par la situation en RCA.

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A l’issue d’un tête-à-tête avec le chef de l’Etat congolais Denis Sassou Nguesso, médiateur dans la crise centrafricaine, le représentant français à Brazzaville, Jean-Pierre Vidon, s’est déclaré préoccupé par les derniers développements de la situation sécuritaire en République centrafricaine :

« Sans doute il faudra du temps pour parvenir aux élections mais il faudra que cette période de temps soit aussi contenue que possible. Il y aura encore beaucoup de négociations à ce sujet, l’essentiel étant que l’on poursuive dans la transition, une transition qui ne doit pas perdurer au-delà des limites qui ont été fixées. Ce que l’on peut souhaiter pour la RCA, c’est que le plus vite possible la transition soit faite pour que les élections puissent se tenir à une échéance aussi proche que possible ».

Une précision toutefois : l’ambassadeur de France au Congo depuis mars 2014 connait bien la RCA ; il y a été premier secrétaire d’ambassade puis ambassadeur. On connait la suite !

 

Report de la conférence des maires francophones.

 

La conférence des maires de Centrafrique qui devait se tenir à Bangui le vendredi dernier, 17 octobre 2014, à l’initiative de l’association internationale des maires francophones (AIMF) en vue de faire un état des lieux des municipalités de la République centrafricaine, a été reportée à une date ultérieure en raison de l’insécurité qui règne à Bangui.

L’édile de Bangui, Mme Hyacinthe Wodobodé a mis en exergue le manque à gagner que devrait procurer la tenue de cette rencontre pour la Centrafrique. Elle a appelé à la cessation des hostilités pour faciliter « la reprise du cycle de développement de la RCA ».

On rappelle qu’en vue de la préparation de cette conférence, l’AIMF a octroyé une somme de 3 millions d’euros (2 milliards de francs CFA) à la municipalité de Bangui.

 

Le proverbe africain dit : « On ne bat pas le tambour dans l’eau ».

 

L’Eufor-RCA joue les prolongations.

 

La Force européenne en Centrafrique dénommée Eufor-RCA a obtenu une prolongation de son mandat, lequel s’étendra jusqu'à la mi-mars 2015 : « Il est important que nous montrions à la population et aux fauteurs de troubles que l’Eufor-RCA est là en permanence, à travers des patrouilles nombreuses qui passent dans le même endroit et qui ne s’arrêtent pas la nuit. Et nous continuerons de le faire, soit à pied soit en véhicule ».

Pour le général Philippe Pontiès, commandant de l’Eufor-RCA, « la position de l’Eufor-RCA dans cette affaire c’est de créer des conditions du maintien ou du renforcement d’un environnement sécurisé pour l’ensemble de la population pour permettre à celles-ci de s’adonner à des activités normales. La population doit être en paix et avoir le droit d’espérer, tout en permettant aux humanitaires de conduire leurs actions et de poursuivre ceux qui n’ont pas intérêt à ce que la paix s’installe durablement dans le pays ».

 

Le proverbe africain dit : « Ne jette pas la provision d’eau de ta jarre parce que la pluie s’annonce ».

 

Paris, le 22 octobre 2014

 

Prosper INDO

 



23/10/2014

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