A7i

A7i

1er Rapport Intérimaire de la Commission de l’Union Africaine sur la situation en République Centrafricaine et les activités de la Mission Internationale de Soutien à la Centrafrique sous conduite Africaine

1ere Partie

ua3.png

 

INTRODUCTION

1. Le présent rapport est soumis conformément au paragraphe 32 de la résolution 2127 (2013) adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies, le 5 décembre 2013. Dans cette résolution, le Conseil a invité l’Union africaine (UA) à lui rendre compte tous les 60 jours, en étroite coordination avec le Secrétaire général et les autres organisations internationales et avec les partenaires bilatéraux concernés par la crise, concernant le déploiement et les activités de la Mission internationale de soutien à la Centrafrique sous conduite africaine (MISCA). Dans ce cadre, la Commission a formellement saisi la France, au titre de l’opération Sangaris, ainsi que les Nations unies, pour solliciter leurs contributions. Le 6 février 2014, la France a transmis les informations sollicitées, notamment en ce qui concerne la coordination entre Sangaris et la MISCA.

 

2. Le rapport couvre la période allant du 19 décembre 2013 à la fin du mois de février 2014, et rend compte des principaux développements survenus en RCA sur les plans politique, sécuritaire, humanitaire et des droits de l’homme, ainsi que des activités de la MISCA, à la suite du transfert d’autorité avec la Mission du Conseil de paix et de sécurité de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale - CEEAC en RCA (MICOPAX). Le rapport se conclut sur des observations sur la marche à suivre.

 

II. ASPECTS POLITIQUES ET INSTITUTIONNELS

 

3. Le Conseil de sécurité se souviendra qu’après le changement anticonstitutionnel de Gouvernement intervenu le 24 mars 2013, et dans le prolongement des efforts de la CEEAC, les acteurs centrafricains sont convenus d’une transition d’une durée maximale de 18 mois devant culminer avec la tenue d’élections présidentielles et législatives. Le 5 juillet 2013, une Charte constitutionnelle de transition a été adoptée, qui fut promulguée le 18 juillet 2013. Un Conseil national de transition (CNT) de 135 membres et un Conseil constitutionnel ont été mis en place, le 15 avril et le 16 août 2013, respectivement. Élu chef de l’État de la transition, le 13 avril 2013, Monsieur Michel Djotodia a prêté serment le 18 août 2013. Maître Nicolas Tiangaye, qui avait été nommé Premier ministre dans le cadre des Accords de Libreville du 11 janvier 2013, est resté à son poste. Les éléments d’une Feuille de route pour la Transition, proposés par le 4ème Sommet extraordinaire de la CEEAC, tenu à Ndjamena, le 18 avril 2013, ont été acceptés par le Gouvernement d’union nationale de Transition, qui a, à son tour, élaboré une Feuille de route plus détaillée, adoptée par le CNT le 7 novembre 2013. Il est à signaler que la loi instituant le Haut Conseil de la Communication (HCC) n’a pas encore été promulguée.

 

4. Toutefois, la situation n’a pas évolué favorablement. Sur le plan sécuritaire, les exactions perpétrées contre la population civile, tant par les ex-Seleka que par d’autres groupes armés, se sont poursuivies. Sur le plan politique, plusieurs désaccords ont opposé les deux têtes de l’exécutif, qui n’ont pu donner l’impulsion nécessaire à la conduite de la transition. De fait, aucun progrès significatif n’a été enregistré dans la mise en œuvre de la Feuille de route pour la Transition, notamment l’objectif prioritaire de rétablissement de la sécurité et de l’ordre public à Bangui et sur le reste du territoire national. La situation humanitaire s’est considérablement dégradée, surtout à la suite des attaques meurtrières du 5 décembre 2013, à Bangui, lancées par des éléments appartenant au groupe dit des anti-Balaka (anti-machettes, même si, en milieu urbain, le terme serait une contraction de l’expression anti-balles AK).

 

5. Au vu de cette situation, le Représentant spécial de l’UA en RCA et chef de la MISCA, le Général Jean-Marie Michel Mokoko, et celui du Président Denis Sassou Nguesso, Médiateur de la CEEAC et Président de son Comité de suivi sur la RCA, ont, en coordination avec les membres de la communauté internationale à Bangui, pris nombre d’initiatives pour aider les acteurs centrafricains à surmonter leurs divergences et à mettre en œuvre la Feuille de route de la transition. Le Représentant spécial de l’UA a ainsi mené des consultations intenses, en collaboration avec le Groupe dit des Cinq (Nations unies, Union européenne - UE, États-Unis d’Amérique et France) et le Comité technique de Suivi des Accords de Libreville, dans le cadre des démarches visant à rapprocher les différents chefs des Institutions de la Transition. De même, il a initié d’autres consultations avec plusieurs Ambassadeurs et représentants d’organisations internationales accrédités ou Envoyés spéciaux dépêchés en RCA.

 

6. Le 28 décembre 2013, une délégation conjointe UA-CEEAC, comprenant les Ministres des Affaires étrangères de la République du Congo et du Tchad, le Ministre de la Défense de la République du Congo et le Commissaire de l’UA à la Paix et à la Sécurité, s’est rendue à Bangui. La délégation a saisi cette occasion pour insister sur la nécessité d’une forte cohésion et d’une réelle unité d’action entre tous les acteurs de la transition.

 

7. C’est dans ce contexte, et eu égard à la dégradation continue de la situation, que s’est tenu, à Ndjamena, les 9 et 10 janvier 2014, sous la présidence du Président Idriss Déby Itno, en sa qualité de Président en exercice de la CEEAC, le 6ème Sommet extraordinaire des chefs d’État et de Gouvernement de cette organisation. L’UA a été représentée à cette réunion par une délégation dirigée par le Commissaire à la Paix et à la Sécurité, et a activement contribué aux consultations qui ont permis de s’accorder sur la marche à suivre. Dans le communiqué qui a sanctionné ses délibérations, le Sommet a déploré la passivité de l’ensemble de la classe politique centrafricaine et l’absence de cohésion, d’harmonie et d’unité entre les autorités de la transition, soulignant que cette situation n’avait pas permis à la communauté internationale d’apporter l’appui requis en vue, de trouver des solutions à la crise. Le Sommet a pris acte de la démission du chef de l’Etat, ainsi que de celle du Premier ministre de la transition, et invité l’ensemble des acteurs politiques et sociaux centrafricains à poursuivre leurs consultations, afin d’élire dans les plus brefs délais possibles un nouveau chef de l’Etat de la transition et de former un Gouvernement de transition, conformément aux dispositions de la Charte constitutionnelle de Transition. Par ailleurs, le Sommet a demandé à l’UA et à la CEEAC, en liaison avec les parties centrafricaines et les principaux partenaires et sous l’égide du Médiateur, d’organiser une conférence nationale de réconciliation.

 

8. Le 20 janvier 2014, et à l’issue d’un vote à deux tours, Mme Catherine Samba-Panza, jusqu’alors Maire de la ville de Bangui, a été élue chef de l’Etat de la Transition, mettant fin à l’intérim assuré, conformément aux dispositions pertinentes de la Charte constitutionnelle de Transition, par le Président du CNT, Alexandre Ferdinand Nguendet. Le Représentant spécial de l’UA a activement travaillé avec le Bureau du CNT pour aider à l’organisation de ce scrutin, notamment la définition des critères d’éligibilité. Il a, par la suite, maintenu une consultation étroite avec le nouveau chef de l’État de la transition sur le format du Gouvernement qui devait être mis en place. Dans un communiqué publié le même jour, la Présidente de la Commission de l’UA a salué ce développement et exhorté les acteurs centrafricains à apporter au nouveau chef de l’État le soutien requis pour l’accomplissement de sa mission. Le 24 janvier 2014, le chef de l’État de la transition a nommé un Premier ministre en la personne d’André Nzapayéké, qui a formé un cabinet restreint de 20 membres, dont 7 femmes. Le premier Conseil de cabinet a eu lieu le 3 février 2014, et fut l’occasion pour chaque Ministre de présenter une lettre de mission devant s’inscrire dans le cadre de la Feuille de route de la Transition.

 

9. Lors de sa réunion du 29 janvier 2014, tenue au niveau des chefs d’État et de Gouvernement, le Conseil de paix et de sécurité (CPS) de l’UA a examiné la situation en RCA. Le CPS a noté avec satisfaction les décisions prises par le Sommet extraordinaire de la CEEAC, réaffirmé le rôle dirigeant du Président en exercice de la CEEAC et du Président de son Comité de suivi dans l’accompagnement politique de la transition, et exprimé son plein appui à leurs efforts. Le CPS a exhorté la communauté internationale dans son ensemble, y compris les Nations unies, à apporter tout le soutien nécessaire aux efforts des dirigeants de la région pour faciliter une action internationale effective en appui à la RCA. Le CPS a exigé de tous les acteurs centrafricains concernés, y compris les responsables des ex-Séléka, des anti-Balaka et du régime de l’ancien Président François Bozizé, qu’ils lancent des appels sans équivoque à leurs partisans pour qu’ils mettent un terme immédiat aux attaques contre les populations civiles et à toute autre action de nature à saper les efforts visant à restaurer la paix, la sécurité et la stabilité en RCA, ainsi qu’à promouvoir la réconciliation. Le CPS a demandé à la Commission de revoir et d’ajuster, en tant que de besoin, la liste des individus faisant l’objet de sanctions, telle qu’annexée à son communiqué PSC/PR/COMM.(CCCLXIII). Le CPS s’est également félicité de la décision du Conseil de sécurité d’imposer, pour une période initiale d’un an, des restrictions sur les voyages et le gel d’avoirs à l’encontre d’individus et d’entités qui seraient désignés par le Comité des sanctions créé par le Conseil de sécurité aux termes du paragraphe 57 de sa résolution 2127 (2013). Le CPS a demandé à la Commission et à la MISCA, ainsi qu’à tous les États membres, d’apporter tout le soutien nécessaire au Groupe d’experts que le Secrétaire général des Nations unies doit constituer conformément au paragraphe 59 de la résolution 2127 (2013).

 

10. Pour sa part, le Comité technique de suivi des Accords de Libreville, auquel participe de droit le Groupe des Cinq, au lendemain de sa rencontre avec le Premier ministre, s’est réuni le 30 janvier 2014 pour établir un plan de travail, afin d’appuyer le Gouvernement, notamment en ce qui concerne la préparation du processus électoral, ainsi que la restauration de l’autorité de l’État dans l’arrière-pays et l’activation des régies financières. À cet égard, le redéploiement de l’administration civile, bien que ralentie par l’insécurité, est en cours, avec la nomination des sous-Préfets et des Conseillers municipaux des huit arrondissements de Bangui.

 

11. Au cours de la période considérée, le Représentant spécial de l’UA a maintenu des contacts étroits avec les acteurs politiques et autres centrafricains, dans le cadre de l’appui de l’UA à la transition en cours. À cet égard, il s’est employé, de concert avec les autres membres de la communauté internationale, à désamorcer la tension née entre M. Djiotodia et Maître Tiangaye, alors respectivement chef de l’État et Premier ministre de la transition, à la suite de la publication de décrets limogeant trois Ministres et le Trésorier Payeur Général, qui, en violation de la Charte constitutionnelle de transition, ne portaient pas le contreseing du Premier ministre. De même, et comme indiqué plus haut, il a activement contribué, de concert avec d’autres membres de la communauté internationale, à la préparation de l’élection du nouveau chef de l’État de la transition, au lendemain des résultats du Sommet extraordinaire de la CEEAC tenu à Ndjamena les 9 et 10 janvier 2014, notamment à travers la définition des critères d’éligibilité. Après l’élection, il a eu des consultations avec le nouveau chef de l’État sur le format du Gouvernement qui devait être mis en place, de manière à faciliter la mobilisation du nécessaire soutien de la communauté internationale.

 

12. En outre, le Représentant spécial de l’UA a rencontré de hauts responsables de pays et organisations partenaires qui ont visité Bangui au cours de la période considérée. Entre autres, il s’est entretenu avec les personnalités suivantes : Mme Samantha Powell, Représentante permanente des États-Unis auprès des Nations unies (le 19 décembre 2013) ; une délégation des Nations unies comprenant le sous-Secrétaire général chargé des Affaires politiques, Taye Brook Zerihoun, le Conseiller spécial du Secrétaire général des Nations unies pour la prévention du génocide, Adama Dieng, la Représentante spéciale du Secrétaire général des Nations unies pour les enfants et les conflits armés, Leila Zerrougui, et Nancy Bright, du Bureau de la Représentante spéciale des Nations unies chargée de la question des violences sexuelles commises en période de conflit (entre le 19 et le 21 décembre 2013); M. Jean-Yves Le Drian, Ministre français de la Défense (2 janvier et 12 février 2014) ; le chef d’Etat-major de l’Armée de terre française, le Général Bertrand Ract-Madoux (le 24 décembre 2013 et le 6 février 2014) ; et le Haut-Commissaire des Nations unies pour les Réfugiés, Antonio Guteres (12 février 2014). À tous ses interlocuteurs, il a présenté la situation qui prévaut sur le terrain, et les efforts politiques et autres de l’UA, et échangé avec eux sur les voies et moyens les meilleurs d’une action internationale plus soutenue en appui à la MISCA.

 

III. ACTIVITÉS EN RAPPORT AVEC ÉLECTIONS

 

13. En ce qui concerne la préparation du processus électoral, il convient de relever que les 7 membres de l’Autorité nationale des Élections (ANE), nommés par décret le 16 décembre 2013, ont prêté serment le 24 décembre 2013, marquant ainsi le lancement de l’opérationnalisation de cette structure. Depuis lors, les membres de l’ANE s’emploient à rendre fonctionnels les locaux qui leur ont été alloués et à adopter leur règlement intérieur. Les Nations unies, notamment le PNUD, ont dépêché des experts pour évaluer le niveau des besoins et définir un budget prévisionnel pour l’ANE. D’autres partenaires, tels que l’UE et la France, ont annoncé leur intention d’apporter des contributions financières. La MISCA assure la sécurité des locaux de l’ANE, ainsi que l’escorte des membres de cette structure lors de leurs déplacements dans Bangui et à l’intérieur du pays.

 

14. L’ANE, avec le soutien logistique du Bureau intégré des Nations unies pour la consolidation de la paix en RCA (BINUCA) et l’appui sécuritaire de la MISCA, a visité des préfectures de l’intérieur, du 14 au 27 janvier 2014, avec pour objectif d’évaluer les ressources disponibles, en vue de la tenue des prochaines élections. En outre, une équipe d’évaluation des besoins électoraux a été dépêchée par les Nations unies en janvier – février 2014. De même la Commission se propose de recruter un expert pour les questions électorales pour appuyer l’ANE. Ce dernier servira d’interface entre la MISCA et l’ANE, afin d’identifier les formes sous lesquelles l’UA pourra poursuivre son appui à l’ANE et à l’ensemble du processus électoral. Du 17 au 21 février 2014, la Commissaire aux Affaires politiques de l’UA s’est rendue à Bangui pour, entre autres, évaluer l’état de préparation des élections et les voies et moyens d’un accompagnement plus soutenu du processus électoral par l’UA.

 



29/04/2014

A découvrir aussi


Ces blogs de Politique & Société pourraient vous intéresser

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 541 autres membres