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Le président burundais assiégé intérieurement, contesté internationalement

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[ Par  Safwene Grira |Mis à jour|27 avril 2015 ]

Le Président burundais, Pierre Nkurunziza, candidat pour un troisième mandat à la présidentielle de juin prochain, se trouve entre l'étau d'une pression internationale se voulant l'écho d'une contestation interne, encore que d'autres éléments plaident pour une issue favorable au chef de l'Etat.

1° Un contexte international hostile

Les Etats-Unis ont ainsi "regretté", samedi, sitôt annoncée, la candidature du président du Burundi Pierre Nkurinziza pour un troisième mandat présidentiel.

Ce point de vue a été exprimé dans un communiqué signé par Marie Harf, porte-parole du département d'Etat américain. Celle-ci semble, en outre, lier cette candidature de trop à des dépassements qui risqueraient de se produire, contre lesquelles elle met en garde Bujumbura.

Le Département d'Etat américain a également préciser que les Etats Unies "tiendront pour responsables les personnes qui participent, programment ou ordonnent des violences contre la population civile", alors que les manifestations prennent de l'ampleur, et que la répression a fait, au moins, deux morts, selon l'opposition, ainsi que des dizaines de blessés.

De son côté, la Belgique a déclaré "prendre note du choix de Nkurunziza", en soulignant son attachement au "respect de la constitution" et qu’en cas de problème d’interprétation, l’accord d’Arusha, le socle de la paix et de la démocratie au Burundi, doit servir de guide".

Cet accord pour la paix et réconciliation au Burundi, signé en 2000, précise, en effet, que pour éviter le retour à la guerre civile, nul ne doit exercer plus deux mandats consécutifs. Le régime de Nkurunziza préfère, quant à lui, se référer à la Constitution burundaise laquelle, si elle semble également limiter à deux le nombre de mandats, y associe, néanmoins, le suffrage universel direct. Or, soutiennent les partisans de Nkurunziza, le premier mandat de celui-ci (2005-2010), le premier après la guerre 1993-2005), s'est effectué, exceptionnellement, au suffrage universel indirect, ainsi qu'en disposait l'accord d'Arusha.

2° Une tension sociale galopante...

Or, le refus d'un troisième mandat pour Nkurunziza semble cristalliser, au delà des débats juridiques, et pour une grande partie des contestataires, toutes sortes de frustrations sociales et politiques. Depuis l'été dernier, les manifesations, insécurité et divers troubles n'ont cessé de fournir aux Burundais le prétexte de descendre dans la rue et d'exercer une pression sur le régime.

3° ...Alimentée par le souvenir d'autres soulèvements:

Emportés par leur mouvement de contestation, devant lequel ils ont pu mettre à l'épreuve les forces de l'ordre en des occasions précédentes (cf. libération du directeur de la radio publique africaine, Bob Rugurika, ou les manifestations en faveur de la libération de l'activiste des droits de l'homme Pierre Mbonimpa) les Burundais semblent d'autant moins vouloir baisser le cran que d'autres exemples proches et récents ont donné raison au peuple selon l'adage latin "Vox populi, Vox Dei". Il s'agit de la "destitution" du Président burkinabè Blaise Compaoré, en octobre dernier, qui soutenait une révision constitutionnelle devant aboutir à déverrouiller les deux mandats constitutionnels. Il s'agit également de la marche arrière spectaculaire du président congolais Joseph Kabila, soupçonné alors de faire d'un projet de loi électorale, le cheval de Troie lui permettant de prolonger, de facto, la durée de son mandat.

Il n'en demeure pas moins que certains éléments jouent en faveur du président sortant Nkurunziza.

1° Le contexte régional:

Tant la République Démocratique du Congo que le Rwanda voisins, dont le destin s'est souvent associé à celui du Burundi, observent avec beaucoup d'attention l'issue du bras de fer s'engageant depuis plusieurs mois entre le régime de Nkurunziza d'un côté, et l'opposition et la société civile de l'autre, atteignant son paroxysme ces derniers jours.

Des observateurs prêtent aux deux dirigeants de ces pays, Joseph Kabila et Paul Kagamé, une ambition comparable à celle de Nkurunziza; s'accrocher au pouvoir au détriment de l'interdit constitutionnel.

Il demeure dès lors probant que tant Kabila que Kagamé reconsidèreront leur velléités de contourner la limitation de deux mandats constitutionnels, respectivement en 2016 et en 2017, à l'aune du sort qui sera réservé à Pierre Nkurunziza en juin prochain, et qu'ils favoriseront, le cas échéant, par les relais qui leur sont propres, une issue honorable au chef d'Etat burundais, répondant à ses souhaits de prolongement présidentiel.

Résumant cet état d'esprit "complice" entre le Rwanda et le Burundi, le Colonel Gaspard Baratuza, porte-parole de l'armée burundaise déclarait, dimanche, à Anadolu, en commentant des informations faisant état d'un déploiement de l'armée rwandaise sur les frontières du Burundi après ces heurts: "Pas de problèmes entre le Burundi et le Rwanda".

2°  Le spectre de la guerre civile, n'est jamais trop loin

Des centaines de milliers de Burundais sont morts dans une guerre civile qui a duré une douzaine d'années. Si l'engouement démocratique des Burundais n'est plus à prouver, force est de constater que leur fougue sera mesurée, ne serait-ce que pour éviter au pays de sombrer dans une nouvelle ère de troubles et de malheurs. Des milliers de Burundais ont d'ailleurs fui vers le Rwanda et le RDC voisins, selon l'ONU, par peur de l'escalade, ces dernières semaines.

3° Un troisième mandat par interprétation

Comme Blaise Compaoré (président burkinabè) en 2005, et Abdoulaye Wade, en 2012, Pierre Nkurunziza n'est pas pour intenter "un coup de force" par le remaniement de la norme fondamentale, mais plutôt par une interprétation. Cette interprétation repose sur un argument aire juridique, lequel peut susciter le refus, tout comme l'adhésion.

 

©AA



27/04/2015
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