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Crise en Centrafrique : la Seleka refuse d'être cantonné et désarmé, interview exclusive du Général Daffane

"Seule l'application des accords de Ndjamena, répondraient aux attentes de la communauté musulmane et symboliserait le rétablissement de la confiance (Général Daffane) »

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Interview exclusive du Général Moussa Daffane, président de l'ex-Coalition Seleka donnée à une agence de presse Internationale: Réalisée par Thierry Brésillon  |Bambari|Mise à jour|27 Mai 2014

 

La coalition Seleka a fermement protesté contre le cantonnement et le désarmement de ses éléments, exigé dans un discours tenu à Bambari (nord-est de la Centrafrique) par une délégation d’officiels centrafricains et internationaux, a indiqué à Anadolu le Général Moussa Daffane, président par intérim de l’ex-Coalition Seleka, dans une interview réalisé à Bambari. 

 

Pour le Général Moussa Daffane, la Seleka est 'l’unique force capable de protéger les musulmans, minoritaires, des milices chrétiennes anti-balaka, donc tant que le processus de paix ne sera pas activé, aucun cantonnement ou désarmement ne sera accepté", comme en témoigne les derniers affrontements entre les forces françaises "sangaris" et la coalition Seleka, qui aurait fait sept blessés et un civil tué, toujours selon le Général.

 

Le Général est convaincu que seule l'application des accords de Ndjamena, qui supposent un partage du pouvoir et la représentation de toutes les communautés, répondraient aux attentes de la communauté musulmane et symboliserait le rétablissement de la confiance.

 

Concernant la partition de la Centrafrique, la Seleka partage l'opinion de la communauté internationale, "il n'est question d'aucune division du pays", a soutenu Daffane. 

 

Voici en intégralité, l’interview exclusive du président de l'ex-Coalition Seleka : 

 

AA : Que pensez-vous des déclarations faites la semaine dernière à Bambari par les représentants du gouvernement et de la communauté internationale appelant la mise en application des mesures de confiance et au cantonnement des troupes de l'ex-Seleka ?

 

Général Moussa Daffane : On ne peut pas désarmer des hommes sans un processus de réconciliation. Pourquoi désarmerait-t-on la Seleka et pas les anti-Balaka ? Vous avez-vu quel effet à produit le cantonnement des Sélekas à Bangui ?  Le résultat est qu'aujourd'hui les musulmans sont cantonnés à Km5 (quartier musulman de Bangui, ndlr) ou à  Boda (sud-ouest). Il y a un amalgame : lorsqu'on cantonne la Seleka, ce sont les musulmans qui sont cantonnés. Si on désarme la Seleka, on s'en prendra automatiquement à la communauté musulmane de Bambari et de la région, et partout où on cantonnera la Seleka. Il faut d'abord changer l'approche de la question. Il faut distinguer la Seleka des musulmans.

 

AA : Il semble qu'il y ait un désaccord au sein de la Seleka entre ceux qui sont disposés à accepter le cadre défini par la communauté internationale, et ceux qui estime que la priorité est de maintenir une autonomie opérationnelle pour protéger les musulmans tant qu'ils sont menacés. Quelle est votre position ?

 

Général Moussa Daffane : Les deux positions sont valables. Sur le plan militaire, je suis d'accord pour dire que l'état-major a été mis en place pour contrôler nos troupes, pour ne pas laisser des éléments incontrôlés commettre des exactions sur les populations civiles et mettre fin aux règlements de comptes. Mais je dois aussi constater que les exactions continuent sur la population musulmane. Si les troupes de la Seleka sont attaquées, elles doivent pouvoir se défendre. Le rôle de la Seleka dans les zones qu'elle occupe est de mettre de l'ordre et d'empêcher les tueries et de protéger les musulmans. On accepte le principe de la primauté des forces internationales pour assurer la sécurité. Mais les troupes de la Seleka doivent pouvoir continuer à agir là où les forces internationales n'agissent pas. Elles sont les seuls capables de le faire.

 

AA : Les forces de la Seleka ont-elles vocation à être une Force républicaine comme la qualifie l'état-major à Bambari ?

 

Général Moussa Daffane : Non. Cette appellation n'est pas le fruit d'une décision du congrès de N'délé. C'est la décision d'un groupe. Cela sera tranché lors de notre assemblée générale. Cela donne une impression de scission, de partition. Je n'adhère  pas à cette idée de partition.

 

AA : Quel est la ligne directrice du projet de la Seleka ?

 

Général Moussa Daffane : Le problème structurel qui guide notre mouvement, c'est la sous-représentation des musulmans dans l'administration du pays, dans les forces de sécurité et dans les institutions. Il faut que les musulmans et les chrétiens aient les mêmes droits dans une république laïque. On ne peut pas aller aux élections sans un mécanisme constitutionnel qui rééquilibre la position des musulmans dans les institutions. Ce n'est pas une question de religion. Il faut défendre celui qui est position de faiblesse, qu'il soit chrétien ou musulman. En ce sens, les accords de Ndjamena sont un début de solution. 

 

AA : Considérez-vous toujours les Accord de Ndjamena comme une exigence ?

 

Général Moussa Daffane : Le sommet de Ndjamena a négocié un accord qui partage le pouvoir pour que toutes les communautés soient représentées. C'est un début de solution à la crise politique. Pour l'instant, seule une partie de l'accord a été appliquée, l'élection de Catherine Samba Panza. Nous avons rempli notre part du contrat. Nous avons fait allégeance à la présidente élue.

 

En termes de rétablissement de la confiance, l'application de ces accords répondraient aux attentes de la communauté musulmane qui est la plus victime. Faute d'application des accords de Ndjamena, on maintient les musulmans dans une situation d'insécurité qui les pousse à partir, ce qui incite à la création d'une partition de fait. Je pense qu'en réalité, on nous pousse dans cette direction en dépit des discours officiels.

 

AA : Quelle relation avez-vous avec le groupe de coordination politique ?

 

Général Moussa Daffane : Cette coordination est chargée de gérer la préparation d'un futur congrès qui définira les orientations et de choisir un bureau politique. Le compte rendu du congrès n'avait pas défini son mandat. Ce qui revenait à lui donner un mandat politique. Le 12 mai, nous avons émis un autre communiqué qui définit son rôle : il s'agit uniquement de préparer l'assemblée générale dans un mois. Elle n'a aucun mandat pour négocier avec le gouvernement.

 

Les prises de position de la coordination politique arrivée à Bangui concernant les mesures de confiance, les élections en février 2015 ne sont pas fidèles aux décisions de N'délé. Elles ne visent qu'à plaire à la communauté internationale et à la France. Cette coordination n'est pas politique. Elle une vocation strictement organisationnelle.

 

Les orientations politiques seront définies au cours de la prochaine assemblée générale. Je suis candidat à la présidence du futur mouvement, mais en tant que 2ème vice-président, je suis le président intérim de la Seleka. 

 

AA :Quelles informations avez-vous de la situation de jeudi à Bambari ?

 

Général Moussa Daffane : Les forces Sangaris ont tenté de désarmer les Selekas et ont essuyé un refus et la situation a dégénéré. Sangaris a voulu forcer, les civils s'en sont mêlés. Il y a eu des jets de pierres. Mes sources à Bambari m'ont informé qu'il y aurait eu sept blessés et un mort, un civil tué par une balle perdue.

 

Je condamne tout affrontement. Sangaris ne devait pas aller désarmer comme ça et la Seleka en refusant est dans son droit. L'attitude de Sangaris s'apparente à  une provocation.

 

© AnadoluAgency 

 

 



27/05/2014

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